C’est le temps d’une dinde… dispendieuse

« Votre dinde de Noël et vos œufs coûteront plus cher cette année, principalement en raison de la grippe aviaire. Une histoire qui mérite plus d’attention qu’elle en a présentement. »

C’est le temps d’une dinde…chère

La grippe aviaire devrait profiter d’une attention médiatique plus importante. Pendant que nos producteurs avicoles ont la vie dure et que les prix gonflent à l’épicerie, une vingtaine de vaches errantes et les cerfs de Longueuil ont reçu plus d’attention qu’il n’en faut. Tout de même absurde ! La grippe aviaire massacre notre secteur avicole et présente un véritable problème. Contrairement aux souches précédentes, la grippe aviaire actuelle qui s’est propagée à travers le Canada fait craindre qu’elle ne devienne endémique chez les oiseaux sauvages, rien de moins. Un cauchemar.

Aux dernières nouvelles, plus d’une soixantaine de fermes font l’objet d’une enquête au Canada, dont sept au Québec. Cette année seulement, cette grippe a infecté environ 200 fermes avec plus de 3,6 millions d’oiseaux à l’échelle du Canada. Voilà tout un inventaire qui n’a jamais atteint le marché de la consommation.

Bien sûr, les prix au détail ont subi les contrecoups de cette maladie depuis des mois. Aux États-Unis, par exemple, le prix des œufs a augmenté de plus de 40 % depuis un an, du jamais vu. Au Canada, où notre gestion de l’offre et notre système de quotas stabilisent les choses, les pronostics ne s’annoncent pas plus reluisants. Les œufs au Canada ont augmenté d’environ 20 % dans certaines régions, la hausse annuelle la plus forte enregistrée depuis 50 ans. Même chose pour le poulet, sans oublier le prix de la dinde du Temps des fêtes qui risque d’en faire sursauter quelques-uns. Le poulet a augmenté de 17 % en moyenne au Canada. Pour la dinde, la hausse dépasse 20 % dans certaines régions, surtout où la grippe aviaire affecte un nombre important de fermes. 

Il y a fort à parier que vos œufs, votre poulet et même votre dinde de Noël coûteront plus cher d’ici quelques semaines. D’ailleurs, si vous planifiez recevoir vos proches avec une dinde, vaut mieux l’acheter maintenant. Les prix augmenteront sûrement dans les prochaines semaines.

Depuis le début de l’année, la grippe aviaire ne cesse de faire des ravages en Amérique et elle a aussi atteint d’autres continents comme l’Europe et l’Asie. La souche actuelle, hautement pathogène, se propage à une vitesse affolante et difficile à gérer. L’Agence canadienne d’inspection des aliments a déclaré récemment qu’elle soupçonnait les oiseaux migrateurs d’être responsables de la propagation de la maladie au Canada. Si la grippe se transmet par les oiseaux sauvages, presque aucune entreprise avicole n’est à l’abri. La gestion des risques devient pratiquement impossible.

La coordination entre l’agence fédérale, les provinces et les producteurs eux-mêmes est nettement supérieure au scénario vécu il y a 20 ans. Les parties prenantes ont appris de leurs erreurs du passé et en connaissent davantage sur cette grippe. L’éclosion actuelle pourrait être pire. Il suffit de penser au carnage causé en 2004 dans la vallée du Fraser en Colombie-Britannique ! Au total, 42 fermes commerciales et 11 poulaillers avaient été affectés, incitant les autorités fédérales à ordonner l’abattage massif d’environ 17 millions d’oiseaux. Tout un désastre ! Cette année, malgré une souche plus virulente, 275 700 oiseaux ont été infectés par la grippe aviaire dans la province jusqu’à maintenant, presque 20 millions de dollars de poulet, irradiés par la grippe.

Mais la grippe aviaire menace l’industrie depuis des mois et la pression pour certains producteurs devient insupportable. Il n’existe aucun autre recours, aucun vaccin pour les oiseaux. Les chercheurs se mobilisent pour possiblement développer un vaccin pour les volatiles. Le risque de voir cette épizootie se transformer en zoonose, une épidémie animale transmissible à l’humain, reste toujours réel. 

Aucun cas humain de grippe aviaire n’a été détecté au Canada jusqu’à présent. Il y en a eu ailleurs, mais pas au Canada. Espérons que cela ne change pas. Il faut aussi préciser que la grippe aviaire ne pose aucun risque de salubrité alimentaire pour les consommateurs.

Pour aider, nous pouvons faire notre part. Selon nos données du Laboratoire en sciences analytiques agroalimentaires, en 2019, avant les restrictions à la frontière pour la volaille et les œufs, environ le quart (24 %) des Canadiens ont fait une excursion d’une journée en voiture aux États-Unis et parmi ce groupe, une personne sur dix (11 %) déclarait rapporter des œufs ou de la volaille crue au Canada. Même si maintenant il est devenu illégal de rapporter de la volaille et des œufs depuis les États-Unis, ne vous laissez pas tenter, car en faisant cela, vous seriez bien mal avisés. Ces produits représentent un risque pour nos producteurs.

Vaut mieux acheter votre dinde et vos œufs ici en toute quiétude.