« Le comité permanent de l’agroalimentaire et de l’agriculture à Ottawa recommande une taxe exceptionnelle pour les épiciers si l’étude du Bureau de la concurrence confirme l’existence de profits excessifs. Toutefois, l’étude du Bureau ne porte même pas sur les profits dans l’industrie, mais se penche plutôt sur la dynamique concurrentielle du marché. »
Le Comité permanent a récemment rendu publics les résultats d’une enquête portant sur l’inflation des denrées alimentaires et examinant si les entreprises du secteur agroalimentaire tirent profit de manière opportuniste du climat inflationniste pour augmenter les prix. Le terme « escroflation », introduit par certains politiciens et économistes, met en évidence la notion de cupidité excessive et d’intérêt personnel pouvant contribuer à des pressions inflationnistes, en particulier chez les entreprises alimentaires.
Ce rapport présente une approche solide et bien fondée, vraisemblablement élaborée par des députés qui ont consacré du temps à comprendre les subtilités de la distribution et de la tarification en alimentation. Il dépasse les nombreuses accusations superficielles que nous avons entendues ces derniers mois. Dans un premier temps, à l’automne dernier, le gouvernement d’Ottawa a exprimé son soutien au concept de « cupidité », mais des experts de l’industrie ont permis aux députés d’acquérir une compréhension plus approfondie sur la question. Par conséquent, le rapport souligne que le Parlement devrait accorder une plus grande priorité à d’autres préoccupations urgentes.
La plupart des recommandations exhortent le Parlement à accorder la priorité à l’efficacité tout au long de la chaîne d’approvisionnement. Cela implique d’appuyer les agriculteurs, de reconnaître l’importance du soutien aux communautés autochtones, en particulier dans les régions du Nord, d’établir des normes réciproques pour les produits importés et d’éliminer les dates de péremption. Malgré la nature diverse de ces recommandations, elles soulignent toutes le besoin urgent d’une politique alimentaire globale au Canada. L’enquête menée par le Comité n’a fait qu’encourager ce que l’on connaît déjà.
D’une importance capitale, le Comité conseille au gouvernement de renforcer le mandat du Bureau de la concurrence et de permettre une surveillance efficace de la concurrence dans le secteur canadien de l’alimentation. Cela implique de s’attaquer aux périodes d’interdiction lors desquelles les détaillants gèlent implicitement les prix de gros, de réviser les mécanismes de partage des revenus et de lever les barrières à l’entrée pour les acteurs externes. Cet aspect apparaît comme l’élément le plus critique du rapport.
Par contre, parmi les 13 recommandations, deux se démarquent. La première concerne la recommandation no 1, qui préconise que le gouvernement canadien prenne les mesures nécessaires pour collecter et divulguer publiquement les données sur les coûts tout au long de la chaîne d’approvisionnement agroalimentaire au pays. Cela comprend l’acquisition de données détaillées sur les coûts dans des secteurs comme l’agriculture primaire, la transformation des aliments et des boissons, ainsi que la vente au détail de produits alimentaires. L’objectif sous-jacent de cette recommandation veut promouvoir une plus grande transparence pour répondre aux attentes du public en termes de réponses et de clarté. Mais la transparence excessive peut poser des défis.
La mise en œuvre d’un tel système qui couvrirait des milliers de produits s’avérerait complexe. De plus, garantir l’exactitude des données représenterait une tâche gigantesque. Les entreprises divulguant leurs coûts réels pourraient se retrouver désavantagées par rapport à celles qui choisissent de ne pas révéler des données précises. Le gouvernement d’Ottawa devrait composer une équipe conséquente de vérificateurs afin de valider l’authenticité des données.
La divulgation des coûts totaux pourrait nécessiter la révélation d’informations sensibles, comme des formules exclusives, des contrats avec des fournisseurs ou des procédés de fabrication. Par conséquent, les entreprises et les investisseurs pourraient choisir de se retirer de ce marché. Cela pourrait donner un avantage injuste aux entreprises étrangères qui ne seraient pas tenues de divulguer leurs informations à moins que leurs activités ne soient basées au Canada. Ironiquement, la divulgation des coûts pourrait engendrer des pratiques collusoires ou anticoncurrentielles entre les entreprises.
La seconde recommandation digne de mention porte le no 9, et propose au gouvernement du Canada d’étudier la possibilité de mettre en place un impôt sur les bénéfices exceptionnels si le Bureau de la concurrence identifie des abus de la part des épiciers. Il est important de souligner que l’étude menée par le Bureau de la concurrence n’a jamais eu pour objectif d’évaluer la cupidité au sein du système. Les banques sont maintenant assujetties à une taxe supplémentaire depuis quelque temps. Vos frais bancaires ont-ils diminué ? Et leurs profits ? Les profits dans le secteur bancaire ont plutôt augmenté.
En somme, au lieu de jeter la pierre, nos efforts devraient se concentrer sur le renforcement de l’industrie alimentaire, conformément aux recommandations du rapport.