Des levures pour remplacer des agents de conservation chimiques dans les aliments

Certains agents de conservation chimiques, peu populaires auprès des consommateurs, pourraient un jour être remplacés par des levures. C’est la conclusion à laquelle arrive une équipe de recherche de l’Université Laval et de l’Université de Lille dans une étude parue dans la revue scientifique Food Bioscience. L’équipe a identifié deux espèces de levure provenant de fromages capables d’inhiber la croissance de certains microorganismes qui réduisent la durée de conservation et la salubrité des aliments.

« Les deux espèces de levure que nous avons étudiées ont été isolées de fromages produits en France et au Québec, mais elles ne sont pas exclusives à ces deux terroirs », explique l’un des responsables de l’étude, le professeur Steve Labrie, de la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation de l’Université Laval. « Elles sont conservées dans la collection du Laboratoire de mycologie alimentaire de l’Université Laval qui comprend plus de 5000 souches microbiennes isolées de laits et de fromages provenant surtout du terroir québécois, mais aussi de quelques autres pays », précise le professeur Labrie, qui est aussi chercheur à l’Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF) et au Centre de recherche en sciences et technologie du lait (STELA) de l’Université Laval.

Les chercheurs ont testé in vitro le potentiel inhibiteur des levures M. pulcherrima et T. asahii contre 16 champignons microscopiques et bactéries, notamment des souches de Clostridium et de Listeria, qui nuisent à la conservation et à la salubrité des aliments et qui peuvent causer des intoxications chez l’humain. M. pulcherrima s’est révélée efficace contre 10 de ces microorganismes alors que T. asahii est parvenue à inhiber 4 des espèces testées.

Les chercheurs ont ensuite évalué, dans un fromage produit en laboratoire, le potentiel inhibiteur des deux levures contre deux espèces de bactéries et deux espèces de champignons microscopiques reconnues pour nuire à la conservation des aliments. Les tests ont révélé que les deux espèces de levures ont été efficaces pour inhiber les champignons microscopiques.

Les expériences subséquentes ont démontré que ce sont des molécules libérées dans le milieu par les levures qui inhibent la croissance des autres microorganismes. « C’est grâce à ces molécules que ces levures parviennent à faire leur place contre leurs compétiteurs dans un environnement comme le fromage, explique le professeur Labrie. Il peut y avoir jusqu’à 500 espèces qui se développent dans des fromages à croûte fleurie et chacune doit déployer des stratégies pour faire sa place dans cet écosystème. »

L’équipe de Steve Labrie a entrepris d’évaluer le potentiel antimicrobien d’autres souches de levures conservées dans la collection du Laboratoire de mycologie alimentaire de l’Université Laval. « Les souches qui sont de grade alimentaire ne posent pas de risque pour la santé humaine et elles pourraient éventuellement être ajoutées comme ferment dans la fabrication du fromage », avance le chercheur.

Parallèlement à ces travaux, son équipe tente d’isoler et de caractériser des molécules antimicrobiennes produites par des levures. « Ces molécules pourraient remplacer des agents de conservation chimiques dans des aliments ou encore être utilisées contre des microorganismes pathogènes en santé humaine ou en santé animale », avance le professeur Labrie.

L’étude parue dans Food Bioscience fait partie des travaux de doctorat d’Aude Commenges, menés dans le cadre d’une formation bidiplômante à l’Université de Lille et à l’Université Laval. Les autres signataires de l’étude sont Marie-Hélène Lessard, Françoise Coucheney, Steve Labrie et Djamel Drider.

 

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