Emballages Carrousel Prendre la relève par amour et loyauté [Partie 1]

Brigitte Jalbert n’aurait jamais imaginé prendre les rênes de l’entreprise familiale. Celle qui s’était jadis dirigée dans des études en arts est pourtant en train de réaliser une promesse faite à son père quand ils se sont entendus pour qu’elle lui succède à la tête d’Emballages Carrousel. Une promesse de 200 millions de dollars ! | Par Pascale Lévesque

C’était dans un resto réputé de la ville de Québec il y a 10 ans. Brigitte Jalbert est alors vice-présidente des Emballages Carrousel. Son père, Denis Jalbert, 75 ans, est attablé avec elle. Il a le regard fier de l’entrepreneur qui a réussi à s’accomplir.

Ce qui a été jadis sa petite entreprise spécialisée en emballages alimentaires, qu’il a fondée en 1971, est devenu un acteur majeur dans son créneau : 200 employés et un chiffre d’affaires annuel de 109 millions de dollars.

Une promesse de 200 millions de dollars

« Si tu veux bien passer le flambeau, il faut que ta relève puisse y toucher pendant que tu es encore là que je lui ai dit, relate Brigitte Jalbert. Je lui ai dressé la liste de tout ce que je voulais faire si j’étais présidente. Lui, il craignait que je sois naïve. J’étais sa vice-présidente, mais j’étais aussi restée sa petite fille. En même temps, je réalisais qu’en vieillissant comme entrepreneur il avait développé une peur du risque. Je lui ai donc promis que j’allais amener l’entreprise à un chiffre d’affaires de 200 millions de dollars. » Une grande promesse ! D’autant plus que prendre le relais d’une entreprise familiale est délicat et n’a rien d’évident.

« C’est un vrai défi», lance Brigitte, qui a commencé à travailler de manière permanente pour l’entreprise familiale en 1986. C’est par amour pour mon père et par loyauté envers les gens qui ont fait d’Emballages Carrousel ce qu’elle est devenue que j’ai eu la motivation d’assurer la suite des choses. »

Brigitte Jalbert se souvient encore d’avoir six ans durant la tempête du siècle au début des années 70, assise dans une traîne sauvage au milieu du matériel qu’il fallait absolument livrer. Une leçon de détermination et de pragmatisme.

« Il a fondé Carrousel après s’être retrouvé sans emploi, lance-t-elle. Il s’est dit que ce serait moins long de se lancer en affaires que de se trouver un job. »

Un parcours atypique

Ni son père ni sa mère, Aline Pitre, qui travaillait aussi pour Emballages Carrousel, n’ont fait pression pour que Brigitte travaille avec eux. Même scénario pour leur autre fille, Martine, devenue une spécialiste des relations publiques et de la gestion d’événements, entre autres au Club des petits déjeuners, où elle a travaillé pendant plus de 20 ans.

« J’ai un parcours assez atypique, indique Brigitte Jalbert. Quand l’entreprise a fêté ses 10 ans au début des années 1980, moi, c’est en arts que je commençais mes études au cégep. En photographie. L’été, cependant, je travaillais chez Carrousel. Puis, je suis partie deux mois en voyage en Europe avec un sac à dos et c’est là que j’ai réalisé à quel point je m’ennuyais. »

Une chose en entraînant une autre, Brigitte a eu la piqûre.

« Tu m’aurais dit il y a 40 ans que j’aurais été présidente de Carrousel, je ne l’aurais jamais cru», insiste-t-elle. Même une fois assise sur sa chaise de grande patronne, elle avait encore du mal à y croire. « J’ai été longtemps complexée, confie-t-elle. Si je me compare aux gens qui ont un poste comme le mien, ils ont au moins un MBA. Je me suis souvent demandé si j’étais une vraie femme d’affaires. »

Mais les employés ont vu la petite Brigitte grandir, puis devenir une collègue qui n’a jamais hésité à relever les défis qu’exigeaient tous les postes qu’elle a occupés. Il a fallu qu’ils lui offrent un témoignage significatif de leur appréciation pour qu’elle commence à y croire.

« C’était un gros cœur façonné dans du bois de grange, se souvient-elle. Il est toujours exposé dans mon bureau. » Un livret d’une douzaine de pages dans lequel les employés d’Emballages Carrousel ont barbouillé le moindre espace de leurs remerciements complétait le cadeau.