Le gouvernement s’éloigne de ses objectifs de la Politique bioalimentaire et favorise l’importation de produits étrangers

Réagissant à l’annonce d’une augmentation du salaire minimum de 0,60 $ au 1er mai 2020, l’industrie de la production de fruits et légumes québécois s’inquiète des impacts de cette mesure sur sa compétitivité. Cette 4e hausse importante consécutive depuis 2016 aura pour effet de réduire sa capacité de production et, conséquemment, l’offre alimentaire de fruits et légumes québécois.

Cette mesure rendra plus difficile l’atteinte des cibles de la Politique bioalimentaire 2018-2025 qui positionne la consommation de produits locaux et la santé des consommateurs via de saines habitudes alimentaires comme priorités. Or, la production de fruits et légumes dépend tout particulièrement du travail de la main-d’oeuvre. L’effet d’une hausse du salaire minimum est directement ressenti par les entreprises de ce secteur. Les coûts de production, déjà croissants dans les dernières années, deviendront critiques pour de nombreuses entreprises, mettant en cause leur capacité à répondre à la demande de produits bioalimentaires d’ici.

L’industrie demande au gouvernement de mettre en place un soutien structurant, comme il l’a fait pour bien d’autres secteurs de l’économie. Elle précise que le seul soutien à la mise en place de projets de recherche et de développement ou pour l’acquisition de solutions technologiques afin de réduire la dépendance à la main-d’oeuvre ne permettra pas aux producteurs d’encaisser ce nouveau coup, du moins à court terme. L’industrie horticole comestible s’explique mal également que le gouvernement québécois n’imite pas la province voisine de l’Ontario qui n’a pas hésité à pallier les enjeux des coûts de main-d’oeuvre en offrant une mesure transitoire afin de faire face à la hausse du salaire minimum.

En bref

• L’annonce du gouvernement portera l’augmentation du salaire minimum à 21,8% depuis 2016, soit plus de 15% au-dessus de l’inflation.
• À elle seule, la masse salariale peut atteindre jusqu’à 50 % des coûts d’exploitation des entreprises horticoles et maraîchères.
• Le secteur québécois est en forte concurrence avec les pays où les coûts de main-d’oeuvre sont moins élevés et où le soutien public est plus important. Le consommateur a le choix sur la même tablette entre des produits d’ici et des produits importés, notre secteur ne peut lui transférer la hausse de coût; c’est la grande différence par rapport aux autres secteurs touchés par la hausse.
• À court terme, le potentiel de mécanisation de la production de fruits et légumes est faible.
• Les programmes de soutien agricole ne sont pas tous adaptés au secteur de la production de fruits et légumes, qui est particulièrement dépendant de sa main-d’oeuvre.

Citations

« En l’absence de soutien structurant et dédié à l’industrie de la production de fruits et légumes québécois, la hausse du salaire minimum met nos producteurs à risque. Notre industrie recourt intensivement à la main-d’oeuvre et nos entreprises ne pourront pas échapper, à court terme, à la hausse des salaires. C’est un phénomène qui nous inquiétait déjà, et l’annonce de cette semaine accentue la situation. Chaque hausse d’une cent du salaire minimum nous éloigne des objectifs de la Politique bioalimentaire et ouvre davantage la porte aux importations de fruits et légumes en provenance de marchés où les coûts de production sont moindres ».
– David Lemire, président de l’Association des producteurs de fraises et framboises du Québec

« Au cours des derniers mois, nous avons établi le dialogue avec le gouvernement pour discuter du risque économique lié à l’importance des coûts de la main-d’oeuvre dans notre secteur. Bien que nos discussions soient orientées sur certaines pistes de solutions, le dialogue doit s’intensifier en vue d’atténuer les conséquences de la hausse du salaire minimum. Si le gouvernement croit au potentiel de développement de notre industrie, veut atteindre les objectifs de la Politique du bioalimentaire 2018-2025 et souhaite répondre aux demandes des Québécois qui veulent consommer davantage des fruits et légumes provenant de chez nous, des actions seront nécessaires ».
– M. Sylvain Térrault, président de l’Association des producteurs maraîchers du Québec