Exportations bioalimentaires : des chiffres encourageants, mais des efforts accrus à prévoir

Les plus récentes données à l’exportation viennent d’être publiées et le Groupe Export se réjouit de l’augmentation de 11 % de la valeur des exportations bioalimentaires québécoises, en dépit des défis supplémentaires engendrés par la pandémie de COVID-19. Alors qu’on pourrait a priori y voir une continuité de la croissance, sans trop de contrecoups sur les exportations, ou encore l’émergence de nouvelles façons de faire des affaires, il en est tout autrement lorsqu’on analyse les données plus en détail. On y voit plutôt une grande capacité d’adaptation devant les défis et beaucoup de résilience. | Par Martin Lavoie, président directeur général

Les chiffres à l’exportation pour 2020 forcent l’admiration, surtout lorsqu’on tient compte du contexte. Après tout, les exportations du Québec vers les marchés internationaux sont passées de 8,8 milliards à 9,8 milliards de dollars au cours de l’année 2020. Cette augmentation de près d’un milliard de dollars nous rapproche de la cible fixée dans le cadre de la Politique bioalimentaire du Québec visant à porter les exportations bioalimentaires à 14 milliards de dollars d’ici 2025.

NET AVANTAGE POUR LES PRODUITS DE COMMODITÉ

En y regardant de plus près, on constate que dans une crise comme cette pandémie, les produits de commodité s’en tirent plus facilement que les produits transformés. Après une année plus difficile tant du point de vue commercial qu’en raison d’une récolte ardue en 2019, les exportations d’oléagineux, principalement de soya, ont connu une reprise plus qu’appréciable avec une hausse de plus de 80 % et un surplus net de près de 400 millions de dollars. Bien que les volumes aient été à la hausse, une importante flambée en fin d’année a également contribué à ce résultat.

La valeur des exportations de porc vers la Chine a, pour sa part, connu une hausse de près de 700 millions de dollars par rapport à l’an dernier, et ce, malgré des problèmes d’accès aux marchés de plusieurs usines dans la dernière portion de l’année. L’adaptation à des problématiques de main-d’œuvre, de santé publique, de productivité et de logistique a entraîné des ventes plus importantes de coupes primaires vers un marché sur lequel la demande fut énorme cette année encore. Même si les exportations vers les autres marchés importants, comme le Japon, les États-Unis, le Mexique et la Corée ont été en baisse, l’augmentation nette demeure à 358 millions de dollars pour le secteur porcin, représentant 19,7 %.

L’IMPORTANCE DE LA DIVERSIFICATION

Le bond de 11 % des exportations bioalimentaires souligne également à grand trait comment l’exportation est devenue une nécessité pour certains secteurs et comment la multiplication et la diversification des segments de marchés et des vecteurs de commercialisation peuvent s’avérer des stratégies payantes.

Faisant face à d’abruptes baisses de la demande sur le marché local, certains se sont tournés vers l’exportation par obligation plutôt que dans le cadre d’une stratégie définie. Par exemple, les exportations dans le secteur de la pomme de terre de transformation ont connu un bond de près de 85 % au cours de la dernière année et la catégorie pomme de terre est globalement en hausse de 43 %. Confrontée à la fermeture prolongée des restaurants, cette industrie a dû trouver de nouveaux débouchés aux États-Unis par nécessité, lorsque la demande locale du secteur du détail n’a pu suffire à écouler les marchandises.

L’année 2020 a également représenté un défi de taille pour d’autres secteurs traditionnellement forts en restauration. En effet, la fermeture des restaurants a eu un impact majeur sur des secteurs tels que celui des produits de la mer ou encore celui de la viande de bœuf, incluant le veau. Bien que les volumes de ventes à l’exportation soient demeurés semblables, ils ont tout de même connu des baisses respectives de 20 % et 21 %, notamment avec le déclin de la valeur des denrées.

Toutefois, ces deux secteurs ont déployé d’importants efforts de valorisation de leurs produits sur le marché local et sont parvenus à écouler les denrées, malgré des valeurs moindres. Il importe également de souligner que la valeur annuelle a également été affectée en lien avec le fait que le premier grand confinement du printemps dernier est arrivé au plus fort de la saison de la pêche au Québec, faisant ainsi lourdement chuter les prix qui ont démontré une belle reprise depuis.

LA FORCE DU RÉSEAU

L’accès au marché demeure l’élément fondamental du commerce international. Il offre plusieurs avenues aux entreprises, dont la possibilité de se réajuster rapidement en cas de perturbations ou de saisir rapidement de nouvelles opportunités. Cette capacité de substitution s’est observée davantage dans les produits de commodité, alors que les produits transformés demandent beaucoup plus d’efforts de commercialisation. Cela dit, des perspectives prometteuses peuvent émaner de la diversification des clientèles et des canaux de distribution.

Heureusement, les exportations vers des clients existants ont, pour la plupart, pu se maintenir, sauf dans les cas intimement liés au secteur HRI. Les entreprises pouvant compter sur des réseaux de relations solides bâties au fil des années, lors de rencontres ou de salons commerciaux, étaient mieux positionnées pour maintenir leurs relations d’affaires. La catégorie « Miel, érable et sucre », par exemple, a connu un bond de 18 %. C’est donc à dire que l’année 2020 réitère l’importance des contacts et la force du réseau, représentant des atouts majeurs en vue d’une réorientation rapide minimisant les pertes et les impacts négatifs.

Par ailleurs, si l’utilisation des technologies de communication virtuelle a pu, dans certains cas, augmenter l’efficacité pour la gestion des relations avec les clients actuels, il n’en demeure pas moins que la pandémie a complexifié de façon importante les méthodes de développement des affaires. Selon plusieurs exportateurs, le développement des affaires avec de nouveaux partenaires est beaucoup plus difficile sans l’aspect relationnel, ainsi que la possibilité de voir et de goûter les produits, qui demeurent sans conteste très importants dans notre industrie.

Ainsi, malgré des résultats positifs en 2020, plusieurs entreprises auront un certain rattrapage à faire en matière de développement des affaires. Elles devront par ailleurs le faire en composant avec des coûts de transport en forte hausse et des taux de change très volatils. Cela dit, les espoirs de réouvertures des frontières qui pointent à l’horizon, combinés aux actions et aux investissements structurants annoncés récemment, permettent d’entrevoir l’avenir positivement en matière d’exportation. La convergence des instances vers une même direction est encourageante et mobilisatrice.

Que ce soit le MAPAQ et son programme Soutien aux exportations bioalimentaires ou le MEI et son Plan d’action pour la relance des exportations, on constate que les efforts se concentrent sur un objectif commun qui illustre parfaitement notre message de la dernière année : débuter en gardant le plus grand nombre d’entreprises en opération et ensuite, stimuler la relance des exportations.